Le 9 juin dernier, la commission des affaires sociales a adopté l’amendement du Gouvernement proposant de modifier les règles de calcul de l’abattement des revenus du conjoint bénéficiaire de l’AAH. Les députés, en votant la proposition de loi avec cet amendement, ont donc maintenu le principe d’une conjugalisation !
Pourtant, en défendant la déconjugalisation de l’AAH, c’est la possibilité de préserver l’indépendance financière tout en construisant une relation affective, qui est promue.
Un enjeu sociétal qui dépasse les clivages traditionnels et qui questionne les fondements de notre solidarité nationale et de notre protection sociale : comment, aujourd’hui, permettre aux personnes en situation de handicap ou atteintes de maladie invalidante, de vivre dignement et de manière indépendante de leur conjoint lorsqu’elles ne peuvent pas travailler ou que leur travail ne peut leur assurer des revenus dignes pour couvrir leurs besoins de la vie quotidienne ?
Une nouvelle fois, le Gouvernement avance le motif de la solidarité familiale qui prévaut sur la solidarité nationale.
Or faut-il le rappeler : l’AAH n’est pas un minimum social comme les autres mais bien un revenu de remplacement pour les personnes qui ne peuvent pas ou plus travailler.
« On ne demande pas l’aumône mais le droit de vivre dignement en étant indépendant financièrement. Imaginez que l’on calcule votre salaire en fonction de celui de la personne avec laquelle vous êtes en couple, qu’on le baisse ou le supprime si votre conjoint gagne trop. Ce serait inacceptable ! Aimer et être aimé ne doit plus représenter un coût pour les personnes en situation de handicap. » explique Pascale Ribes, présidente d’APF France handicap.
C’est ce que le Gouvernement et les députés de la majorité et du Modem ont refusé d’entendre.
Lors d’un débat houleux à l’Assemblée nationale aujourd'hui, le Gouvernement et sa majorité parlementaire, en soumettant au vote leur seul amendement et en rejetant tous les autres, n’ont pas permis un véritable débat démocratique et ont organisé une obstruction à la possibilité de délibération de la représentation nationale. Et ce malgré la quasi-unanimité des autres groupes présents dans l’hémicycle.
En rejetant la déconjugalisation de l’AAH en dépit de son adoption par le Sénat en mars dernier, des dizaines de milliers de personnes bénéficiaires de l’AAH et vivant en couple sont ainsi maintenues dans une situation de dépendance financière vis-à-vis de leur partenaire.
Aujourd’hui, le Gouvernement n’a donc pas su saisir l’occasion historique que lui offrait un mouvement porté par une grande partie de la représentation nationale et par la société civile d’individualiser l’AAH, alors même qu’il avait fait du handicap une priorité de son quinquennat.
Le droit de vivre dignement, en étant indépendant financièrement de son/sa partenaire, est ainsi une nouvelle fois bafoué !
Aussi, aux côtés d’acteurs de la société civile, APF France handicap poursuivra sa mobilisation, notamment lors des prochaines discussions qui se tiendront en 2ème lecture au Sénat, même si l’adoption définitive de la proposition de loi reste totalement incertaine dans les mois à venir.
Il est plus que temps que le Gouvernement entende enfin la voix des personnes en situation de handicap et de la société civile. C’est en agissant ensemble que la justice sociale, la reconnaissance et l’effectivité des droits fondamentaux pourront enfin être pris en compte.
Sources: Intranet APF France handicap